Dominique Vaufreydaz, enseignant chercheur de l’équipe Prima nous présente ses recherches. Doter les ordinateurs de la capacité de percevoir et d’interagir avec leur environnement et les personnes et plus particulièrement sur le maintien à domicile avec des robots compagnons.
Veiller le quotidien, aider aux gestes de tous les jours, proposer une présence rassurante, voilà l’une des applications de ses recherches…
Un des enjeux de société majeur pour les décennies à venir, est le maintien de personnes handicapées, fragiles ou âgées à domicile. Dans ce contexte, l’utilisation de robots compagnons devient une piste de recherche.
Kompaï, robot compagnon développé et fabriqué par Robosoft dans le cadre du projet DOMEO/AAL
Ces robots possèdent toute une panoplie de fonctions leur permettant d’assurer à la fois une surveillance bienveillante, en lien avec des aidants (professionnels mais très souvent ce sont des proches), mais également d’effectuer différentes tâches pour améliorer la qualité de vie de la personne aidée comme :
- le maintien du lien social ;
- l’assistance dans les tâches quotidiennes ;
- des jeux sérieux ou serious games (entretien cognitif dans le cas de personnes souffrant des prémisses de la maladie d’Alzheimer, suivi d’exercices de gymnastique, …) ;
- le suivi des médications et de l’état de fragilité de la personne.
Pour améliorer l’acceptabilité de ce robot compagnon au quotidien, par les personnes concernées, il est important d’intégrer des capacités d’anticipations et d’interaction. Il doit avoir un comportement et des réactions acceptables et compréhensibles pour un être humain.
L’engagement :
Lors d’une interaction entre humains, il est naturel pour ceux-ci de reconnaitre des signaux sociaux implicites (postures, regards, gestes, intonations de la voix, déplacements, etc.) indiquant les intentions de son interlocuteur : lorsque que l’on aborde quelqu’un dans la rue, celui-ci sait instinctivement que nous souhaitons interagir avec lui. On appelle cela l’engagement.
Pour rendre nos robots plus sociables, et donc plus acceptables, nous développons des algorithmes de perception multimodale leur permettant de détecter l’engagement des utilisateurs envers eux. Pour cela nous travaillons avec un robot doté de microphones, d’un télémètre laser, de caméras et d’une Kinect. Nous en extrayons différents paramètres permettant d’identifier ces signaux sociaux implicites.
Les résultats actuels :
Dans plus de 90% des cas le robot reconnait qu’une personne s’approche de lui avec l’intention d’interagir. Ces recherches ont également corroboré d’autres travaux effectués dans le domaine des sciences cognitives à savoir que la rotation relative des épaules de l’utilisateur, sa vitesse, le fait que son visage nous fait face et s’aligne avec le nôtre, sont parmi les critères les plus importants pour la détection de l’engagement.
- Mais ce n’est que le début ! Tout n’est pas résolu pour autant
Pour l’avenir :
D’autres aspects, non techniques, sont cruciaux et doivent être pris en compte.
À court terme, il ne faut pas tomber dans l’effet « uncanny valley » : donner des capacités sociables à un robot laisse croire aux utilisateurs que celui-ci possède des facultés cognitives qu’il n’a pas. S’il ressemble trop à un humain alors cela provoque une gêne voir un rejet complet du robot. Il faut aussi réfléchir à des aspects éthiques : jusqu’où peut-on (ou veut-on) aller dans l’utilisation de ces robots compagnons ?
À plus long terme, doter des robots de ce genre de capacités risque d’avoir des implications très large au niveau de la société, au point que des sociologues et des philosophes s’interrogent sur la place de ces robots dans le futur : devra-t-on les doter de règles, voir leur donner des droits ?
- Nous verrons si la réalité rejoindra la science fiction…
Dominique Vaufreydaz
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